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DÉVELOPPEMENT PERSONNEL

Religion ou spiritualité ?

Dans un monde en quête de sens, religion et spiritualité offrent deux chemins parfois convergents, parfois opposés.

Si dans la théorie, la religion et la spiritualité se veulent libératrices; prônant pour l’une le salut par le respect des textes sacrés et l’exercice d’une foi structurée, et pour l’autre, une quête intérieure plus flexible associée à des rituels de méditation ;

Dans la pratique, il en est tout autre.

Dimanche dernier, un jeune ami m’a invitée à son église, appelée WINNERS CHAPPEL. Hésitante au départ, j’ai fini par accepter, par curiosité, mais aussi par respect pour lui. Le culte a duré un peu plus de deux heures, et tout au long de cette expérience, mes pensées ont eu le temps de vagabonder.

Au fil des chants, des prières et du prêche, une question s’est imposée à moi : Sommes-nous vraiment en quête de Dieu ou simplement en quête de réconfort ?

Cela fait un moment déjà que j’ai envie d’écrire sur le sujet ; et ce culte a éveillé en moi une série de réflexions profondes sur des problématiques bien réelles, surtout dans les communautés noires, et plus particulièrement en Afrique.

Concernant WINNERS CHAPPEL (“Chapelle des Vainqueurs”), il s’agit d’une église fondée entre 1981 et 1983 par David OYEDEPO, pasteur nigérian, et compte plusieurs églises dans le monde, pour environ 8 millions de fidèles.

Selon le magazine américain Forbes,

« Oyedepo est le prédicateur le plus riche du monde, avec une fortune estimée à plus de 150 millions de dollars américains. L’église possède quatre jets privés et plusieurs bâtiments, notamment à Londres et aux États-Unis. Oyedepo est auteur et éditeur ; il a écrit plus de 70 ouvrages, en plus de publications périodiques. Il est président-directeur ou éditeur de Dominion Publishing House (DPH), la branche éditoriale du ministère. DPH compte à ce jour plus de 4 millions d’exemplaires imprimés en circulation. »

L’amnésie historique : la religion, héritage de la colonisation

On oublie trop souvent, que la religion (je parle principalement du christianisme), a été introduite en Afrique par les missionnaires coloniaux, et a massivement servi leurs intérêts avant tout.

Il s’agissait pour eux, de trouver des moyen de légitimer l’ordre social colonial en promouvant les valeurs européennes ; tout en décrivant les traditions locales comme barbares ou même sataniques.

Les rites et spiritualités africaines ont été diabolisés, décrits comme superstitieux et infidèles, et les missionnaires ont fini par imposer leur vision du monde, changeant intégralement le système de croyances des peuples installées sur les terres convoitées par le colon.

Tout ce qui constituait les piliers de nos sociétés, ont été éradiquées, par la violence et la peur : les structures sociales, la langue, l’enseignement, le droit.

On se demande dès lors, si avant la colonisation, les africains n’avaient-ils pas des croyances ? des dieux ? des pratiques spirituelles ???

Ce processus a contribué non seulement à la perte d’autonomie des communautés ; mais aussi à une forme d’asservissement culturel.

La conversion (forcée) obligeait à renoncer aux pratiques ancestrales, entraînant indéniablement une rupture avec l’identité collective : le christianisme devint ainsi un instrument symbolique et politique d’accompagnement de la colonisation.

Ainsi, nos ancêtres ont été convertis à coups de dogmes, parfois de fouets, et leurs croyances ancestrales diabolisées : les masques traditionnels sont devenus “satan”, les devins des “sorciers”, les rituels des “abominations”.

Nous avons perdu des pans entiers de notre culture spirituelle : les dialogues avec les ancêtres, la médecine sacrée, la conception d’un divin enraciné dans la nature et la communauté.

Tout ceci explique aujourd’hui, les dérives dont nous sommes témoins, la première étant le culte de l’homme de Dieu.

Le culte des pasteurs : quand l’homme prend la place de Dieu

Dans bien des églises africaines aujourd’hui, ce n’est plus Dieu qui est au centre, mais l’homme qui prétend parler en son nom.

En effet, les fidèles ne suivent plus une doctrine, mais un “homme de Dieu”, qui devient figure d’autorité suprême, intouchable, infaillible, parfois craint plus que Dieu lui-même !

Pire, dans certaines assemblées, il est interdit de critiquer le pasteur ou de remettre en question ses paroles.

Ces derniers (les pasteurs), se sentent légitimes dès lors pour exiger toutes sortes de choses farfelues, et leurs suivants n’y voient que du feu ; par exemple le prophète congolais Joël Francis TATU, qui aurait exigé une “semence” de 5 millions de FCFA pour une prière ;

Ou encore, les adeptes du « fais ce que je dis, pas ce que je fais », ceux-là même qui prônent l’humilité et la sobriété mais vivent pourtant dans l’ostentation.

Par exemple, le pasteur ghanéen Kelvin Kwesi Kobiri, qui s’est acheté une Range Rover avec les offrandes, a subi le courroux des fidèles, le pasteur nigérian Chris Oyakhilome, qui prêche que ceux qui donnent seront bénis financièrement, plusieurs pasteurs ivoiriens qui encouragent leurs fidèles à donner des sommes à l’église, soit disant pour leur salut…

Ces cas sont légion, et la multiplication des églises dites “charismatiques” encourage une “personnification” de la foi, où le pasteur devient une sorte de gourou charismatique autour duquel la communauté gravite, reléguant Dieu lui-même au second plan ;

Ce qui conduit à une absence de relation personnelle avec Dieu (ou l’univers), et à l’opposé de la spiritualité.

Une foi déconnectée : absence de relation personnelle avec Dieu

Le drame silencieux de cette religiosité moderne, à mon avis, c’est la perte de toute intériorité.

La foi, autrefois chemin intime et spirituel, devient un spectacle dirigé, une sorte de théâtre : on écoute, on répète, on consomme ;

Et les croyants sont réduits au rôle de spectateurs passifs, dépendants du discours du leader religieux, sans jamais développer une relation personnelle avec Dieu.

La quête de transformation intérieure est remplacée par une obsession pour le miracle instantané, la prophétie spectaculaire, la délivrance théâtrale ;

Ce qui nous donne une masse croyante mais désorientée, qui ne connaît rien de la liberté spirituelle ; pour qui la religion et l’église, ne sont que des échappatoires.

Une église refuge face à la dure réalité sociale

En effet, comment blâmer des populations brisées par la pauvreté, le chômage et l’instabilité politique, qui trouvent dans l’église un dernier refuge ? L’église est souvent un lieu de chaleur humaine, de solidarité, d’espoir.

C’est l’emblème même de la communauté.

De plus, elle propose des réponses simples à des douleurs complexes, tout en tablant sur les insécurités de ceux qui la fréquentent.

Cependant, j’observe que cette promesse devient parfois piège. La souffrance des fidèles est exploitée, les dîmes sont exigées, les miracles vendus au plus offrant.

On constate ainsi l’avènement d’une une foi sous tension, plus anxieuse que libératrice… et les pasteurs s’en servent pour faire grandir leur patrimoine.

Le business religieux : la foi transformée en industrie

Malheureusement, le constat est sans appel : là où il y a foi, il y a marché, et certains leaders religieux l’ont bien compris !

Les pasteurs deviennent des influenceurs, les églises des multinationales… À Lagos, Accra ou Abidjan, les plus grandes églises possèdent chaînes de télévision, universités privées, écoles bibliques, maisons d’édition, labels de musique.

Mais pendant ce temps, la majorité des fidèles peinent à nourrir leurs familles, à scolariser leurs enfants, à vivre décemment et dignement. Pourtant, ils restent.

Foi ou endoctrinement ? Je pense plutôt que c’est le ferme espoir de devenir un jour aussi “béni” que leur pasteur. Le rêve d’une ascension spirituelle ou plutôt sociale, qui rendrait tous leurs sacrifices légitimes.

Pour conclure…

À mon humble avis, il serait temps de sortir de la dépendance religieuse pour entrer dans une quête de sens plus authentique. La spiritualité ne nécessite ni bâtiment, ni intermédiaire. Elle commence par une introspection, par une connexion personnelle avec ce qui nous dépasse — Dieu, l’univers, la vie.

À votre avis, peut-on concilier les deux ?

La religion peut prescrire, là où la spiritualité invite à explorer. En toute chose, il faut savoir faire preuve de discernement.

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